Michel Chaillou dans Triages
Les vies imaginaires des voix. Sous ce titre, Serge Martin, universitaire et poète, ouvre un dossier Michel Chaillou dans Triages, la revue littéraire et artistique (« à parution annuelle mais néanmoins aléatoire ») de Tarabuste Editions. Dans la
Colloque à l’Université d’Angers
Michel Chaillou : une écriture en parcours
Colloque organisé par Pauline Bruley de l’Université d’Angers, CERIEC (EA 922), en partenariat avec la Bibliothèque nationale de France, l’Académie littéraire de Bretagne et des Pays de la Loire, l’Université du Littoral-Côte d’Opale, et avec les Lyriades de la langue française.
Domestique chez Montaigne
Le manuscrit et ses brouillons (« le livre défait »).
[l’hommage de la BnF du 18 mars 2010 à la remise du manuscrit].
Le Sentiment géographique
Le mamuscrit et ses brouillons, du temps où je croyais écrire une thèse qui devint, presque à mon insu, durant six ans, un poème pastoral. [la réception de la BnF du 18 mars 2010 à l’occasion de la remise du manuscrit]
Entretien et digressions
Digressions
Lire la note (datée du 22 août) me concernant, et tous les autres propos du blog.
Extrait du Magazine des livres, juillet-août 2009
Vingt-cinq livres plus tard, Michel Chaillou poursuit inlassablement sa quête du temps, une recherche qui n’a rien de nostaligique. De ses phrases affleure un parfum entêtant, enivrant, qui flotte encore, longtemps après avoir refermé le livre. Grand prix 2007 de littérature de l’Académie française pour l’ensemble de son oeuvre, Michel Chaillou revendique le démodé, qui n’est autre que « la façon dont le temps s’habille ». Mais que l’on ne s’y trompe pas : démodé ne veut pas dire hors du temps. Chez Chaillou le style est constamment réinventé. Une forme de modernisme qui fait de lui un grand classique.
Quel est le rôle de la mémoire dans votre oeuvre ?
Important dans mes récits à caractère autobiographique, moindre dans les autres ouvrages où c’est plutôt une sorte d’imagination du passé, d’un passé qui ne m’appartient pas, que j’essaie de ressusciter …
Lire la suite dans le Magazine des livres n° 18
Voyage parmi les étoiles sérieuses
Sur France Culture, une exploration du ciel intérieur dans le cadre de la série "Les histoires du Pince-Oreille".
Une étude de François Bon
Michel ChaillouDigression majeureMichel Chaillou n’a décidément pas changé. Rien, ni ses livres.C’est la syntaxe, qui le définit, et une façon de marcher – en langue, s’entend. C’est un promeneur : et toujours le même jardin quasiment à l’identique, mais où il déploie une fois de plus toute la littérature appelée, ses âges, ses pilotes (d’autres qui lui ressemblent).Ce n’est pas son premier livre où transparaît son expérience poitevine.Ce qu’on retrouve, dans les ombres : la mère, le Maroc,la guerre, la bibliothèque du grand-père, le vague écho manouche, les ciels d’ouest et l’art même de parler, les recoins obscurs d’une honte non sienne, mais jamais complètement finie d’être vidée, et sans laquelle il n’yaurait pas eu ce chemin qu’il a fait.La Gartempe traverse cette petite ville dont il parle,et qu’il nomme Montauvert, comme il y a un diable Vauvert. Est-ce que la force d’une histoire tient au fait qu’on reconnaisse une ville pour nôtre ? Oui, quand on a eu son adolescence ici, on ne lira pas Chaillou comme on aime, en littérature, s’en aller dans ces villes inventées, qu’elles soient celles d’Italo Calvino (Les villes invisibles) ou d’Hermann Hesse (Steppenwolf, avec le même genre de solitaire tenant journal) ou même comme Jean-Christophe Bailly avait construit son Olonne. Lycée Camille-Guérin, Poitiers, 1970 : dans ma classe d’internes, nous venions de Civray, Loudun, Saint-Maixent, Thouars… Autant de villes disposant encore de leur pleine structure complexe, d’une hiérarchie sociale aussi stable que ces vieux bâtiments qui en faisaient, souvent autour du noyau féodal, les ombres et élévations très secrètes qui servaient de lycée, de tribunal d’instance, ou que la mairie avait pu reconvertiren bibliothèque ou écoles de musique.Ce sont ces villes que la Ford Anglia du jeune enseignant ayant pris chambre à Poitiers, mais muté ici ou là, ressuscite, et nous les reconnaissons : si cela s’était appelé Montmorillon, par exemple, cela n’aurait été que Montmorillon, et non pas ce partout et nulle part qui est nous, et le hasard de notre histoire. J’aurais sans doute lu autrement ce roman de Michel Chaillou s’il s’était passé dans le Cotentin (magnifique Indigne Indigo en 2000), ou ces expéditions en voiture dans les fins fonds de France, où c’est chaque fois la littérature qu’on croise (La France fugitive, Fayard,1998, ou en poche).Mais pour nous, qui le connaissons,qui lui avons dette, Michel Chaillou n’est pas seulement un écrivain, ou bien, ce qu’il est comme écrivain, nous le projetons plus loin que le livre. «J’arrivais d’Algérie, de la guerre.»
Ce qu’il nous a apporté, c’est un déplacement de frontière. Elle est fine, impalpable : la littérature est toujours née de la littérature. Il n’y a pas de conquête possible au présent de cette simplicité d’une histoire, de ce mystère du rythme d’une prose si on ne va pas l’éduquer ou le former dans la singularité multiple qui est celle de la totalité d’une langue. Par exemple, si j’étais Michel Chaillou parlant – comme il le fait, improvisant, ayant apporté dans sa tête trois ou quatre souvenirs de livres et vous parlant deux heures avec cela –, je vous dirais par coeur la phrase suivante, sans effort, juste pour l’avoir lue et reconnue : J’arrivais d’Algérie, de la guerre. J’enseignais les lettre dans un vieux lycée pacifique à Montauvert, modeste bourgade poitevine que peuple une pauvre rivière moitié torrent qui irriguait aussi mes pensées.
Et je vous parlerais de cette mince virgule, dans le six-trois de la première phrase, et comment le mot guerre vient ronger non pas l’Algérie, probablement, mais le je initial. Et puis, dans cette phrase qui nous amène à Montauvert, qu’on découvrira sur la Gartempe, je vous signalerai comme en passant le long et doux adjectif pacifique, mais appliqué au lycée, et non la phrase qui brosse la ville comme d’une aquarelle suspendue, et sans ce déport il n’y aurait pas la liberté de résonance que prend, tout à la fin, ce mot pensées.
Combien de fois je l’ai entendu, Michel Chaillou, dans ses improvisations de conteur ? Au point que parfois elles me cachaient l’auteur : il me fallait cette présence de visage et de gestes (les mains parlantes de Chaillou) et je ne saurais jamais rouvrir par exemple le Grand Meaulnes sans que me revienne sa voix, une fois, sur«pourquoi trois, mais pourquoi trois ?» dans la phrase d’Alain-Fournier : le mystère des trois greniers. Sauf que cette strate inexplicable, parfois incohérente, signe seule les grands ouvrages, les grandes syntaxes, même dans cette chose si commune que doit être la littérature: mise en partage de ce qui nous est commun, et son interrogation devant le temps.
Un marcheur de la littérature
Le mot donc d’improvisation, pour Michel Chaillou,comme qualifiant aussi cette geste narrative quideviendra notre propre marche dans l’ouvrage, sesallers-retours et ses portraits de profs comme pris dujour, attachés à leur tâche de tous les jours et rêvantcomme un autre. Ou l’étrangeté de cette Finlandaise dans un jardin de Niort un soir de lune, et que finalement c’est de grammaire latine (mais pas seulement quand même) qu’on s’explique.
Chaillou est un marcheur de la littérature, c’est elle que d’abord il arpente. Lisez donc, si vous le trouvez,son Petit guide pédestre de la littérature (écrit avec sa compagne, Michèle – et republié chez Fayard en 2000 sous un titre que j’aime moins : La Fleur des rues). Et c’est ce «sentiment géographique» (titre d’un de ses premiers livres, en 1976), le rêve des livres emportant la déambulation réelle qui crée, d’une chose aussi simple que ranger la Ford Anglia et grimper à la chambre louée dans le vieux Poitiers, cette convocation de l’imaginaire qui nous permet que la lecture soit roman. Dans ce passage,par exemple, je l’entends d’avance, le Michel (maisi l ne commente pas ses propres livres, il vous citerait Barbey d’Aurevilly ou mille autres), vous attrapant par le bras, et chuchotant de façon à ce qu’on l’entende depuisle trottoir d’en face : «Mais comment le mot secret, àcet endroit-là, entraîne tout le paragraphe ? Essaye de leplacer n’importe où ailleurs et tu verras…»
Pour gagner mon chez-moi, il fallait d’abord pénétrerl e garage et, parmi les odeurs d’huile et d’essence, les mille bruits toujours râleurs des moteurs à explosion, emprunter tout de suite à main droite un escalier secret, quasi dérobé jusqu’au premier étage à paillasson où chancelait ma porte qui fermait mal. La pièce était vaste, tapissée d’un papier peint usagé dont j’ai perdu les figures, toutes mythologiques me semble-t-il. La chasse au cerf devait dater de plusieurs siècles, car le hallali avait manifestement gagné le papier, déchiré parle temps plutôt que par la meute à moitié effacée des chiens hurleurs. Je n’aperçois plus le coin lavabo.
Alors oubliez que ce livre roule, en Ford Anglia, sur des routes que nous reconnaissons : le monde de l’après-guerre d’Algérie n’est plus depuis longtemps. On a mis nos supermarchés et nos rocades à la place, et construitdes lycées neufs. Mais laissez-vous prendre à ce qui,chez Chaillou, sera toujours l’impossibilité du roman ordinaire : les événements, des livres. Les labyrinthes, des bibliothèques. Les adultères, les traversées du temps. Les personnages : pas forcément ceux qu’il vous montre, mais tant de fantômes qui viennent, amusés,lire sur son épaule.
(L’actualité Poitou-Charentes, avril-mai-juin 2009, n°84)
Collège Vaserman – feuilleton
L’adaptation du Collège Vaserman mon roman théâtral, sur France Culture. Un feuilleton en dix épisodes. avec Claude Pieplu dans le rôle du pédagogue, Anne Kreis, Leila Bakhtiar, Gilles Gabay, Vincent Grass… et bien d’autres comédiens. Bruitage : Caroline Ledoux. Réalisation : Jean Couturier.
Descendre la Volga ou le voyage immobile
Une improvisation en direct sur France Culture, du 31 août au 4 septembre 1992. Réalisation Jean Couturier .
De la source du fleuve à son embouchure, à chaque escale montent des passagers d’époques différentes et cela s’achève par aujourd’hui et un colloque avec les saumons de la Caspienne.
A propos de ce voyage sur les ondes, lire l’entretien avec Laetitia Legay intitulé "l’écriture radiophonique est comme un campement nomade" (La lettre de Radio France, été 1992).
La France en zigzag
Une balade, l’été, sur France Culture. J’étais parti d’un texte d’un négociant suisse anonyme d’environ 20 pages. J’en sélectionnais un passage, une ou deux phrases, et je le dilatais le temps de l’émission.
Michel Chaillou, rêveur de mots
C’est le titre de l’article que la revue Chroniques de la Bibliothèque nationale de France consacre à l’écrivain dans son dernier numéro d’avril-juin 2015, à travers une interview de sa femme Michèle.
Les derniers jours heureux
Tous les soirs, du 24 décembre 1977 au 1er janvier 1978.
Une improvisation en direct dans un programme spécial composé par Alain Veinstein. Réalisation coordonnée par Evelyne Frémy et Marie Rose Dérouet.
"Ici les derniers jours heureux, un bateau, un livre, une voile ajoutée aux dernières heures de l’année. Il fait nuit noire. J’émets sur petite fréquence de rêve. Depuis le large des îles Marschall, à des centaines de milles à l’est de la Papouasie Nouvelle Guinée. Douze mois que je suis parti de France, 362 nuits par soleils nagés, lune et étoiles immergées, courants, danger des récifs. Mes pensées à force de baigner dans la saumure sont presque poissons … Ecoutez…"
Perdus dans la mer de Weddell
Un feuilleton en neuf épisodes réalisé par Jean Couturier, diffusé sur France Culture du 1er au 10 août 1977
Neuf hommes en perdition sur une banquise de l’Antarctique tentent, après le naufrage de leur navire l’Aventure, de gagner la terre ferme incarnée par plusieurs îles au large du continent antarctique.Ils s’aident dans leur progression angoissée successivement de chiens, de traineaux, d’embarcations, de rames, de voiles. Nous assistons à leur odyssée par le truchement d’un poste émetteur ne possédant aucun retour. Ils appellent sans savoir si on les entend. Ils appellent comme des sourds, au milieu de la glace chancelante, de la mer démontée, dans la rage du vent et des monstres marins. Pendant neuf jours, l’auditeur se trouve branché sur un effroi au pôle sud. Le hasard a fait que France-Culture, sur modulation de fréquence, a pu les entendre.
Tout finira bien. Ils seront sauvés.
Avignon Coeur de lion ou les quatre samedis du roi Richard
Chanson de bruits et de voix avec la participation fortuite des habitants, le temps d’un festival. Aventure héroïque mêlée de prose et de vers, mise en musique par les rues, les places, le Rhône. Feuilleton inventé par une ville, avec l’aide bénévole et de tous les instants d’un rémouleur d’histoires, racommodeur de propos, et de ses machines. Douze épisodes d’un quart d’heure, trois par samedi, joués sans comédiens et réalisés par Janine Chollet.